Peut on augmenter les salaires dans l’hôtellerie & restauration ?
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Tout cela sous-entend que les Français sont d’incorrigibles fainéants, préférant vivre des aides publiques plutôt que des fruits du travail.
Il est vrai que vivre avec le smic voir moins est et reste une perspective très attrayante !!!
Mais les presque 6 millions de personnes en demande d’emploi ne sont pas forcément formées ou qualifiées pour ce que sont les métiers de serveurs, cuisiniers, commis, pâtissiers ; réceptionnistes, managers etc… Car, contrairement à une idée reçue (ou hérité de l’ANPE des années 80), quiconque ne peut travailler dans l’hôtellerie restauration. Ce sont de vrais métiers qui demandent une solide formation, du caractère et qui sont en majeure partie exercés par des passionnés.
La crise sanitaire liée au Covid pourrait bien se poursuivre par une « crise de croissance » avec plus de consommateurs souhaitant se faire plaisir et passer du temps à table. Et donc plus de couverts qu’avant.
Or, cette crise a accéléré la pénurie de personnel déjà en cours depuis plusieurs années. Selon une étude nationale de l’UMIH, 150 000 salariés de l’hôtellerie-restauration ont changé de métier depuis la crise de la Covid-19.
Changements d’aspirations, pénibilité du travail, horaires ingrats (nombre d’heures, pas de valorisation des horaires de nuit, dimanches, jours fériés), problème de rémunération, difficulté de service autant de facteurs qui ont poussé les travailleurs à changer de voie pendant la crise.
Dès lors, comment motiver des salariés pour un métier au départ mal rémunéré, souvent très contraignant et peu valorisant alors que partout on glorifie l’argent facile : Startup, nouvelles technologies, blogueurs, sans parler des joueurs de football, des spéculateurs boursiers ou des grands patrons ….
Mais tout le monde n’est pas encore en position d’augmenter les salaires. La crise n’est pas passée.
Le prix moyen du couvert au déjeuner baisse ! Comment faire vivre une structure professionnelle avec des tickets moyens à 15 euros.
La fréquentation des restaurants est en recul au profit des « points de bouffe ». Il n’y a pas que les grandes brasseries parisiennes ou celles des grandes villes, il existe aussi un tissu de restaurants à travers le pays qui est en grande difficulté.
Peu attractifs, ces établissements n’ont certainement pas l’intention d’embaucher par manque de marge brute et de chiffre d’affaires. La période de crise que nous traversons oblige à jouer la carte de la prudence et dans le secteur de la restauration la baisse de la TVA il y a un certain temps et le soutien du gouvernement pendant la crise ont permis à de nombreux restaurateurs d’éviter le licenciement de personnel, à défaut de créer des postes.
La piste de la rémunération au pourcentage ne peut s’appliquer qu’à certaines catégories de la profession comme la brasserie ou la gastronomie, mais ces activités ne représentent qu’une faible partie du secteur.
Et pour en rajouter, notre Ministre du Travail fait savoir qu’elle n’est pas contente des restaurateurs et des salaires qu’ils proposent à leurs salariés.
Elle pointe en outre le fait que ce secteur a fait partie des plus aidés depuis le début du Covid-19.
Très bien…….mais :
Ce ne sont pas les restaurateurs qui ont demandé à fermer pendant presque un an.
Si les politiques n’avaient pas « tués » ce métier en lui imposant un horaire hebdomadaire ce qui a eu pour conséquences d’avoir besoin de deux équipes pour deux services au lieu d’une, les employés seraient toujours aussi bien payés qu’avant.
Si l’on avait imposé en France le brevet professionnel pour ouvrir un restaurant comme pour tous les autres métiers de bouche ou spécialisés, beaucoup de non professionnels ne se seraient pas improvisés restaurateurs et les investisseurs non professionnels n’auraient pas pu acheter et gérer d’affaires en direct , ce qui a eu pour conséquence de rendre les prix des restaurants inaccessibles à quelqu’un du métier.
Tant que l’on n’aura pas réglé en France le concept de « loyers de murs », les restaurateurs enrichiront des rentiers qui détiennent des murs à la place de ceux qui les valorisent.
Les normes imposées par les gouvernements pour les établissements sont tellement drastiques que les coûts de production ont flambés…. Nous pourrions continuer longtemps sur les conséquences néfastes qu’ont eu les politiques depuis 40 ans sur la restauration.
Ce fleuron de l’excellence et de l’art de vivre à la française, qui permettait il y a encore 20 ans à des détenteurs de CAP d’en vivre décemment est en train de mourir, parce que des « financiers » qui ne le connaissent pas s’en sont mêlés.
Les professionnels de la restauration devront donc encore une fois s’adapter, prendre du recul sur leurs métiers et leurs façons de faire en imaginant de nouvelles organisations et de nouvelles méthodes de travail.
La crise ayant été une accélération dans bon nombre de domaines, elle aura aussi permis une prise de conscience sur la nécessité de changer ses méthodes de recrutement et de fidélisation des collaborateurs.
LE PAVE (De bœuf) DANS LA MARE
« Le service est-il compris ? » … « Le service oui, mais pas le pourboire Monsieur… »
Combien d’entre les employés d’hôtels et de restaurants s’amusent de cette réplique pour grappiller quelques sous, sans pour autant saisir le tort que cette situation bien réelle fait à leur condition sociale depuis de nombreuses années.
Emmanuel MACRON vient d’annoncer la défiscalisation des pourboires payés par carte bancaire… Merci monsieur le Président, c’est un premier pas après des décennies de précarité. Un petit pas pour l’homme mais un tout petit pas en matière d’humanité… Il va falloir faire plus pour que nos professionnels affichent haut et clair le métier qu’ils exercent, parce qu’ils ne sont pas nombreux ceux qui laissent systématiquement un pourboire en plus de leur addition.
Quid des notes de frais d’entreprise ou le pourboire ne sera pas remboursé au collaborateur dont le montant de CB diffèrera obligatoirement de la note de restaurant.
Rappelez-vous de l’époque, celle juste avant la numérisation du paiement et de l’avènement de la carte de crédit. Cette époque ou le client vous tendant des espèces pour régler sa note, vous disait : « Gardez-la monnaie… ».
Cette époque où à la fin du service, pourboires en poche, vous alliez avec vos collègues, vous aussi, consommer dans d’autre établissements pour finir la soirée. Cette époque où travailler dans l’hôtellerie ou la restauration faisait de vous un travailleur socialement et économiquement intégré.
Une ministre m’avait un jour posé la question : « Notre réputation en termes d’accueil dans nos établissements hôteliers et nos restaurants n’est pas toujours bonne auprès de la clientèle étrangère, qui nous compare avec d’autres destinations plus performantes comme les États Unis … d’où cela vient-il ? »
Sûrement parce que le « Tip » motive le staff à soigner sa relation client, à se dépasser, et même dépasser l’horaire à l’approche de la « fermeture des cuisines ». Pensez-donc ! Combien 8, 10 ou 12% de la note finale ça motive, avec la banane en plus ?
Bon, alors, puisque les restaurateurs n’ont pas les moyens d’augmenter les salaires, les pauvres propriétaires de logements (souvent insalubres) de baisser les loyers pour les jeunes, les saisonniers et autres professionnels (Souvent à moins de 2000 € bruts par mois, voire 1500 pour la majorité et au smic pour les débutants), établissons le « Tip à la française », mais qui ira cette fois directement dans la poche des travailleurs de la profession, et sans que BERCY y voit, là encore de quoi racketter.
Promis, à 21h45, on ne vous dira plus qu’on va fermer et on ne mettra plus les chaises sur les tables en éteignant le fond du restaurant pour vous faire décamper….
La crise sanitaire vient de réveiller les consciences : Gouvernants, décideurs, législateurs … Vous voulez du service et aider concrètement la filière … va falloir lâcher.
Pour conclure :
Patrick Ben Bouaziz
Patrice Bensalem
Avec l’aimable participation de Sophie REA
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